Le web est d'abord une architecture basée sur un client léger dans lequel le navigateur (Internet Explorer, Firefox,..) agit comme un terminal (ex: un minitel) et se connecte à un serveur web qui réalise les traitements et renvoi un résultat affiché par le navigateur. Le navigateur ne fait donc qu'afficher, il ne réalise pas de traitement. Ce modèle s'oppose à une architecture basée sur un client lourd qui réalise lui-même les traitements et ne communique avec le serveur que pour échanger des données brutes.

Il est aujourd'hui acquis que le modèle web défini comme utilisant un client léger s'éloigne de la réalité. D'une part, des applications web à base d'Ajax tendent à reproduire des comportements de clients lourds. D'autre part, les navigateurs s'enrichissent en fonctionnalités. Enfin, d'autres outils que le navigateur tendraient à remplacer le navigateur dans l'accès à l'information sur internet. On peut se risquer à prédir une percée de certaines technologies à des horizons plus ou moins proches.

1 An :

Il paraît indiscutable que de plus en plus d'applications web seront réalisées en Ajax. Il s'agit d'applications complètes à l'image de Gmail et pas d'applications classiques avec une surcouche sympathique dans l'interface (comme des edit in place, des complétions, etc...). De telles applications utilisent massivement le javascript en complément des langages de développements côté serveur (PHP, dot net, j2ee,...). Mais on a déjà évoqué ce sujet dans d'autres billets. Il est intéressant de constater l'émergence d'une nouvelle race d'applications : les toolbars. On connaissait les plug-in, les add-ons. Mais Firefox et Xul facilitent et encouragent le développement de toolbars (environ 380 pour Firefox 2 sur http://extensions.geckozone.org/Firefox), destinées à l'origine à des fonctions purement internet et un peu gadget:
  • Viamatic foXopse (pour avoir un aperçu de toute les pages ouvertes dans un même écran
  • web developper toolbar ou firebug utilisé chez Nalis par les développeurs web
  • google toolbar (et autre consoeur) pour le référencement, l'accès au moteur ...
Mais ces mécanismes vont plus loin; des outils comme Greasemonkey ou gmail better permettent d'offir de nouvelles fonctionnalités à des sites internet. Greasemonkey permet d’agir, directement sur la page web. Quelques exemples :
  • Hotmail Companion, masque la pub et autre fioriture Microsoft, affiche l'email de l'expéditeur en rollover, modifie l'affichage.
    Avant Après
  • Automatiser des actions dans un jeu en ligne (Ogame)
  • Le Google Tag Cloud Maker génère un nuage de tag dans la page de résultat de recherche de Google.
L'essor des toolbars est facilité par xul. Xul est un langage de description d'interfaces graphiques basé sur XML. Un tel langage facilite le travail du développeur et permet d'écrire l'interface d'une application aussi aisément qu'une page Web. Xul est maintenant aussi disponible dans open office pour lequel on peut s'attendre à une avalanche de plug-ins. Mais le principal est que l'on peut trouver des toolbars ou des extensions qui sont de véritables applicatifs :
  • FireFTP est une véritable application FTP (application encore réservée aux informaticiens, mais qui n'est plus seulement du web).
  • Biet-O-Zilla permet de gérer et surveiller les enchères sur Ebay. Enchères, taux de change, gestion de plusieurs comptes, ...
Les extensions s'emparent également des concepts collaboratifs du Web 2.0. Ainsi, "The Coop" est une extension Firefox pour réseaux sociaux (http://wiki.mozilla.org/Labs/The_Coop). "L' intelligence" du dispositif n'est plus sur un site type Friendster mais sur le navigateur lui-même.
Pour les entreprises, on a déjà des exemples précurseurs de développement d'application sur le mode toolbar. Ainsi, le principal applicatif métier du Monde.fr, "Sept" est une application Xul sous Firefox. On dispose ainsi de l'interface d'une application dédiée conjuguée avec un déploiement facilité. Pour le e-commerce, on imagine facilement des toolbars agrégeant différents sites. Les fonctions de recherche, de présentations de la fiche produit, de navigation peuvent être réalisées par une toolbar interrogeant les services web des sites marchands. L'intérêt de la toolbar est dans l'unification de fonctions transverses. Ainsi, on peut programmer la toolbar pour générer des d'alertes (ex : disponibilité de la Wii dans tel site) valables pour plusieurs sites en une seule action et ceux mêmes sur des sites qui ne proposent pas cette fonctionnalité . Les processus d'achats et de paiement restent propres au site marchand.

2 ans

L'arrivée d'une nouvelle génération de navigateur va offrir de nouvelles possibilités. Ainsi, Firefox 3 s'ouvre aux applications web ... offline. Quel auteur n'a jamais souhaité rédiger un billet pour son blog sans connexion internet ? Comment utiliser son web mail offline ? Aujourd'hui, la suite Zimbra permet d'utiliser un webmail offline.
Des bibliothèques permettent déjà de simplifier le développement d'application en leur apportant des capacités de travaille off-line. Ainsi, le toolkit Dojo bénéficie depuis février d'une fonctionnalité offline. La technologie web remplace le client serveur. Ce mouvement est justifié par le fait que le Web est maintenant le format de plus en plus d'application métier. Ces applicatifs souffrent parfois de ne pouvoir être utilisé off-line. Cette fonctionnalité n'est possible que grâce à l'installation d'une petite application Java (donc pas très pratique) mais les navigateurs vont évoluer et potentiellement rendre une installation supplémentaire inutile pour ce type de fonctionnalités. Techniquement, en quoi cela consiste-t-il ? On connaît déjà les cookies. les cookies sont créés par les serveurs et stockés par le navigateur. Ensuite, le cookie est lu par le serveur (mais jamais par le navigateur). Le globalStorage introduit par Firefox 3 (des mécanismes offline sont déjà présent dans Firefox 2) sera un conteneur de données lu par le navigateur (mais pas par le serveur). On peut facilement créer son identité numérique complète sur le navigateur qui sera ensuite utilisée partiellement pour des applications
  • communautaires:
  • partage de photos
  • professionnel (CV, ..)
  • sites marchands (N° CB, liste d'article à vendre ou recherché)
  • rencontre (profil)
  • ...
Là encore, le e-commerce peut profiter de cette technologie comme pour les toolbars et va inciter une plus grande concurrence. Saisir une fois des informations de profils pour les retrouver sur tous les sites peut être particulièrement intéressant. Finis les formulaires d'inscription à rallonge ! Pour les entreprises, les enjeux sont énormes, toutes les applications nomades sont concernées.
La difficulté dans la généralisation de ces fonctionnements offline sont la capacité des navigateurs. Malheureusement, Scott Dietzen, le président et responsable technologique (CTO) de Zimbra reconnait qu'Internet Explorer ne permet pas encore d'imaginer de réaliser des applications offline. En début de semaine, Microsoft a présenté officiellement Silverlight , qui apparait dans la continuité de la stratégie de Microsoft, mais pour l'avenir du web, les regards se détournent plutôt vers d'autre (Google ?).

3 ans et +

A l'origine, le web permettait à des webmasters de proposer un contenu à des internautes/visiteurs. Mais les internautes ont voulu de plus en plus proposer leur propre contenu, contribuer ce qui a donné : les blogs, flickr, youtube, etc ... le concept web 2.0. Mais tous ces services restent hébergés par des sociétés qui conservent le contrôle des serveurs et des données avec ce que cela implique (modération, censure, problème de droit d'auteur) dans un business modèle basé sur la publicité (et tout le monde n'aime pas que l'on fasse de l'argent sur son dos en affichant des trucs qui clignotent partout). Une évolution possible dans cette logique est que les internautes deviennent les producteurs et les hébergeurs de leurs contenus. Il ne s'agit pas d'avoir un serveur à la maison, mais de créer des services basés sur le peer to peer. La recherche est très active, Intel investit notamment dans ce domaine. Par ailleurs, la société Akamai, connue pour ses services de mise en cache à destination des gros consommateurs de bande passante, a annoncé avoir racheté Red Swoosh, une société spécialisée dans la distribution de fichiers en peer ro peer. Ce rachat est logique puisque le cache web est en concurrence avec la diffusion distribuée qu'offre le peer to peer. Pour les professionnels, c'est le signe de plus que le peer to peer a gagné sa légitimité. (source Ratiatum.com )
Mais un changement plus profond semble inévitable au long terme (notion relative en informatique) : l'interface.
Second Life, le Playstation Home, Habbo hotel, World of Warcraft,... présentent un concept de navigation en 3 dimensions. Ces univers sont des jeux, des divertissements, des espaces de communications ou de vente comme peut l'être le web actuel. Il semble que se promener sur internet comme on déambulerait dans un univers en 3 dimensions est une évolution logique, car plus naturelle. La navigation dans l'espace remplacerait alors la navigation hypertexte et on changerait de pièce ou d'étage comme on change d'onglet aujourd'hui. Voilà un concept innovant, mais pourquoi malgré la quantité d'outils proposés, le concept ne semble t'il pas percer ? On a beaucoup parlé de Second Life, mais au-delà de l'effet de mode que reste-t-il ? Aujourd'hui et contrairement au web, ces applications restent des outils propriétaires non standardisées. On ne peut pas créer son espace Second life comme on crée son site web, on est dépendant de LindenLab (éditeur de second life). De plus, l'utilisation de tel ou tel univers suppose l'installation d'un client lourd spécifique alors que les navigateurs sont largement préinstallés sur tous les dispositifs permettant d'accéder à internet. Des développements open source d'univers 3d sont nés, parmi lesquels Opencroquet :
Ces projets sont à surveiller, ils pourraient devenir les standards de demain. On imagine l'immense intérêt pour le e-commerce. L'immersion dans un supermarché ou une boutique en ligne 3D est bien plus agréable pour l'acheteur que des pages web. Le panier aurait une existence 3d au delà du concept.


Le web est un standard basé sur des normes des protocoles et des langages (http, html, javascript...) dont les possibilités ont finalement peu évolué. Il faut s'attendre à passer un palier important, car la technique permet une évolution très importante et les utilisateurs y seront gagnants. Comment les utilisateurs s'approprieront ces nouvelles technologies ? En octobre 2006 Jakob Nielsen publiait que dans une communauté en ligne, 90% des utilisateurs en moyenne sont passifs, 9% contribuent occasionnellement, et 1% sont à l'origine de l'essentiel de l'activité. Seulement 0.16% des visiteurs de Youtube y déposent des vidéos, pour Flickr, 0.2% de visiteurs déposent des photos. (source Sébastien Billard)
Le concept du web 2.0 dans lequel l'utilisateur publie du contenu est un mode de fonctionnement qui n'est adopté que par une partie des internautes. On peut donc s'interroger sur la différence entre la vitesse d'évolution de la technique, la vitesse d'évolution des comportements des utilisateurs et la vitesse à laquelle des changements majeurs pourront être appropriés.